XVIe Festival
23 septembre - 2 octobre
Programme du Festival 2016

édito


Quand je travaillais entre Estinnes et Gosselies, dans une vie antérieure, en passant, je regardais bruler les palettes sur le rond point de Caterpillar. Nous, techniciens ouvriers dans cette PME qui venait tout juste de franchir le seuil des 50 salariés, on préparait notre première élection de délégués, et honnêtement, on les regardait avec admiration, les Caterpillar. Quand les palettes brulaient sur le rond-point, quand la route du zoning était fermée, on klaxonnait tous avec ardeur. Les plus chauds ouvraient le carreau de la camionnette pour lever le poing, agiter un foulard du syndicat, ou lancer un slogan, un encouragement. De cette période je retiens le concret. Pas seulement le concret du cambouis, des roulements, des clés dynamométriques et des moteurs à courant continu. Surtout le concret de la lutte des classes. Tous ces cravatés dans les tours de verre et de béton, comment agiraient-ils si dans leur vie, une fois au moins ils avaient été directement les mains dans le cambouis, le cambouis de la lutte des classes ?... Nous devons leur imposer un monde dans lequel virer quelqu’un aille nécessairement au delà d’une signature sur un papier, parmi mille papiers. Que virer quelqu’un implique, au moins, de perdre sa chemise, et de rembourser les cadeaux fiscaux perçus…
Et mieux encore. Nous devons leur imposer un monde dans lequel chacun travaille pour tous. Comme il le veut. Dans lequel chacun reçoit un salaire à vie. Dans lequel le directeur financier serait aussi l’éboueur une partie de l’année.
Remballer ce monde dans lequel les journaux sortent les classements des belges les plus riches, pendant que certains salariés n’ont pas de quoi se loger, se chauffer, se procurer une alimentation saine, et rêver…
Et la jeunesse, dont on entend qu’elle n’a pas de repères politiques, est captive d’un système qui la broie.
Tailler notre temps à la tronçonneuse, fracturer entre travail et chômage, exclure d’une main et de l’autre obliger à rendre des comptes.
Y’en a marre. Nous, on veut la lune, bougres de faux jetons à la sauce tartare.