FSM 2015 Tunis

FSM 2015 Tunis Malheureusement, des perturbateurs se sont glissés dans l’assemblée. Dans le haut de l’amphithéâtre 1 de la Faculté de Droit, une bande de jeunes hommes nous fait subir un vacarme incessant de sirènes de matchs de foot. Après quelques minutes, ce groupe fait son coming out de couillons en brandissant une pancarte : "BLAA BLAA BLAA". Ils seront vite sortis par les volontaires du Forum, sous les "dégage !" de la foule. Le message n’est pas clair : de l’action plutôt que des paroles ? ou un simple dénigrement ?
Mon voisin, un jeune étudiant tunisien qui prépare un mémoire sur le mouvement féministe en Tunisie les trouve bien téméraires de venir se frotter à cette assemblée de "die hard feminists". Une femme noire du mouvement Rural Women, assise devant nous, se retourne et l’interpelle en riant : « Do you agree with them ? »

Plus sérieusement, une autre nature de perturbation est à l’œuvre dans la salle : le conflit qui oppose le Maroc et l’Algérie au Sahara occidental s’est invité, et toutes les parties comptent bien se faire entendre, et avoir le dessus. Toutes les interventions sont interrompues, voir écourtées. A chaque fois le slogan "So So So Solidarité avec les femmes du monde entier" permet de remettre en avant l’objet de l’assemblée, et les attentes des femmes présentes. La représentante du mouvement des femmes de Ciudad Juarez est interrompue à trois reprises. La française, syndicaliste de Solidaires, n’aura pas la parole assez longtemps pour livrer son message. Une cohue frénétique tente d’imposer sa présence sur l’estrade, une guerre de drapeaux fait rage pour occuper l’espace. Finalement la coordinatrice de l’assemblée annonce que la dernière intervention prévue, une femme palestinienne, sera suivie d’une prise de parole des parties en conflit, parce que le FSM est aussi fait pour débattre…

En parcourant la liste des organisations présentes au Forum Social Mondial, il apparait évident qu’il sera investi tant par des combats idéologiques que par des guerres territoriales en cours. Malheureusement il ne suffit pas de convoquer un Forum Social Mondial pour construire l’unité internationale des organisations progressistes. Dans le combat pour le monopole de la vérité, l’intransigeance radicale des uns se confronte au réformisme des autres tout comme s’affrontent les différentes interprétations des conflits en cours.

A n’en pas douter, cette expérience m’apportera au moins autant de questions que de réponses...