Si vous avez raté le premier épisode, lire ici
Si vous avez raté le deuxième épisode, lire ici
Si vous avez raté le troisième épisode, lire ici
Si vous avez raté le quatrième épisode, lire ici

Ce samedi, y faisait tellement beau qu’on a décidé de jouer dehors. Dominique nous avait ramené son p’tit fils, Antoine, qui fait de l’impro et qui avait bien voulu accompagner sa Nonna à son atelier un samedi matin.

On s’est mis en cercle, dans l’herbe, entouré des oiseaux qui chantaient le début de l’été. On a commencé par se chauffer un peu, et puis on a fait différents exercices de jeu et de techniques.
Dominique ne sera pas présente à la fête des ateliers, mais je ne voulais pas qu’elle se retrouve uniquement spectatrice de la scène en élaboration.

L’enjeu de cette séance, une fois parvenu à définir les thèmes, le lieu, et des débuts de personnages, était de théâtraliser l’ensemble. Rendre vivant les corps, faire exister des nuances, des variations, des couleurs. Créer du rythme et impulser un souffle quoi !

On a repris des techniques de théâtre-image. On a fait des exercices de démarches, pour définir les caractéristiques principales des personnages, leur façon de se tenir, de bouger, de regarder les autres. Et on a joué debout, pour libérer les corps, parce que assises c’est quand même compliqué de maintenir une tension dramatique !
Et puis on a découpé la scène globale en plusieurs séquences, et on a retravaillé depuis le début. En essayant de garder présent tout le travail de corps qu’on avait fait avant, les moteurs internes de chacun des personnages : quelles sont leurs sensibilités compte-tenu du vécu qu’on leur a créé, les propos qui les mettent en rage, ceux qui les font sourire, ceux qui leur ôtent tout leurs moyens. On a essayé de faire exister le poids d’un silence lourd de sens, plus éloquent que bien des paroles vaines. De passer du conflit ouvert à l’incompréhension, à la complicité puis à l’isolement. De chercher comment jouer l’impuissance et la douleur grave qui l’accompagne. Avec la meilleure attention possible à l’impression visuelle, à ce que l’on voulait susciter dans le public.

C’est un processus extrêmement compliqué dans lequel ce groupe s’est lancé. Alors qu’elles n’étaient jamais monté sur une scène, les voilà, avec une motivation impressionnante qui force l’admiration, à prendre à bras le corps des considérations que l’on souhaiterait voir plus souvent dans le milieu du "théââââtre" ! Certes, l’exigence de l’animatrice (héhé) n’y est pas étrangère, mais c’est parce que je les sens réceptives, motivées, volontaires.

C’est une très belle expérience que nous vivons. Je ne me permettrai pas de parler en leur nom, mais je dois dire que je suis bluffée. Imaginez-vous qu’en fin de séance (séances qui semblent passer de plus en plus vite !), les dames ont décidé de s’aménager deux répétitions entre elles, pour avancer plus vite et avoir quelque chose de plus abouti la prochaine fois que l’on se reverrait !
Et ça, ça me fait vraiment plaisir. Parce que ça veut dire qu’elles y prennent assez de plaisir pour s’investir personnellement, au-delà de leurs engagements de base. Ca veut dire qu’un groupe se constitue, avec de la confiance, une volonté de partager et de construire commune. Et surtout, ça veut dire qu’elle n’ont plus besoin de moi. Qu’alors qu’on commence avec ce traditionnel rapport au formateur savant à qui l’on remet l’autorité de juger ce qui est bon ou pas, elles prennent conscience de leur propres potentiels de création, de décision collective. Qu’en fait elle sont parfaitement à même de savoir elles-mêmes ce qui est intéressant et de choisir les moyens pour l’exprimer. Elles prennent confiance en elles quoi.

On va encore dire que j’suis sentimentale, mais j’vous promets que j’suis émue. C’est exactement pour ça que j’ai choisi ce boulot.